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Le nouvel accord commercial pourrait transformer les chaînes de valeurs agricoles africaines

La mise en place tant attendue de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA), prévue pour janvier 2021, pourrait transformer les chaînes de valeurs agricoles, le secteur agroalimentaire, l’emploi, et la sécurité alimentaire dans la région, d’après un nouveau rapport du panel de Malabo de Montpelier. La zone de libre-échange pourrait augmenter le revenu global de 76 milliards de dollars et augmenter le commerce intra africain de plus de 50 pourcent.

 

Un système basé sur les règles, ainsi que des innovations technologiques, institutionnelles et politiques seront cependant nécessaires afin de récolter les fruits potentiels de l’accord. Le rapport de Malabo, Echanger plus : innovations politiques pour étendre le commerce de produits alimentaires et agricoles en Afrique, se base sur trois communautés économiques régionales (COMESA, CEDEAO, et CDAA) afin d’aider les décideurs politiques africains à mettre en place la Zone de libre-échange continentale africaine et d’augmenter les échanges agricoles intra régionaux de manières durables et efficace.

 

Pour quelles raisons le commerce intra régional est-il important ?

 

Le commerce intra africain reste très faible : moins de 20 pourcent, avec la plupart de ces échanges se concentrant sur les produits miniers et le pétrolier. De plus, bien que la moitié de la population active travaille dans les chaînes de valeur agricoles, les importations de produits alimentaires et agricoles coûtent environ 72 milliards de dollars par an à la région, et ce coût augmente chaque année. Avec une population africaine grandissante et s’urbanisant, il existe de nombreuses opportunités pour augmenter la compétitivité des secteurs agricole et agroalimentaire de la région en développant le commerce intra régional.

 

Ce développement améliorerait également la sécurité alimentaire, le revenu, et le bien-être global de la région. En effet, il générerait de la croissance économique et créerait de nouveaux emplois pour la population jeune en plein essor. Les petits exploitants pourraient avoir un meilleur accès aux marchés locaux et régionaux, et les consommateurs auraient accès à des produits alimentaires plus abordables et nutritifs.

 

Augmenter le commerce n’est cependant pas sans risque. Les risques identifiés inclus la dégradation environnementale et la dépendance d’un pays sur ses partenaires commerciaux. Toutes les mesures visant à développer le commerce devraient tenir compte de ces risques afin de réaliser les bénéfices de ce développement sans exposer les pays à des chocs nouveaux ou inattendus.

 

Recommandations pour la ZLECA

 

Heureusement, d’après le rapport de Malabo, l’expérience des communautés économiques régionales de l’Afrique fournissent des systèmes d’actions clairs permettant de répondre aux risques et de récolter les bénéfices des échanges intra régionaux. Ces derniers peuvent être regrouper en six recommandations principales.

 

  1. Soutenir les commerçants en leur apportant des informations et des données. Afin d’avoir des relations efficaces et mutuellement bénéfiques, les partenaires commerciaux et les gouvernements ont besoin d’avoir accès à des informations de qualité des deux côtés de la frontière. Cela inclut des informations sur l’échelle des échanges, sur la qualité des produits, sur les tendances des échanges, et sur les prix du commerce formel et informel. Il est donc important de fournir des formations et un accès aux ressources aux producteurs et aux commerçants afin qu’ils atteignent les normes de qualité alimentaires internationales et les normes de sécurité, ainsi que de mettre en place des infrastructures et des programmes permettant d’augmenter les compétences des femmes commerçantes. 
  2. Réduire les droits de douane et les barrières non tarifaires. Les droits de douanes élevés restent une entrave au commerce intra régional en Afrique, de même que les barrières non-tarifaire telles que les quotas, les procédures de douanes complexes, les subventions, et les règles phytosanitaires. Des efforts pour réduire ces barrières en réduisant les droits de douane et en coordonnant les règlementations sanitaires, phytosanitaires et les standards de qualité, ainsi que pour développer les communications (en particulier grâce à l’utilisation des technologies d’information et de communication) autour des mesures douanières et d’autres prérequis permettraient de rendre les échanges plus efficients.
  3. Optimiser les infrastructures. Les échanges impliquent les déplacements physiques de biens, ce qui requiert des infrastructures de transport tels que des routes, des ports, et des véhicules. Cependant, les systèmes d’échanges modernes dépendent également d’autres types d’infrastructures : de l’énergie, des télécommunications, d’autres infrastructures logistiques, ainsi que de structures règlementaires/institutionnelles et de processus qui soutiennent tous ces facteurs. Les gouvernements jouent un rôle important dans l’entretien et l’amélioration de ces infrastructures. Cependant, les acteurs du secteur privé devraient également être amené à fournir des ressources financières, des programmes de formation et d’éducation, et des innovations technologiques et logistiques.
  4. Accorder les priorités à travers les frontières. De nombreux pays africains et de blocs régionaux ont des Plans d’investissement agricoles nationaux et des Plans d’investissement agricoles régionaux. En coordonnant les mesures exposées dans ces plans, les décideurs politiques peuvent réaliser les bénéfices du développement des échanges intra régionaux tout en atténuant les risques potentiels.
  5. Mettre en priorité l’amélioration des chaînes de valeur pour augmenter la compétitivité. Stimuler les échanges équivaut à stimuler l’offre de produits agricoles et alimentaires, ainsi que les capacités de production alimentaires. Investir dans l’amélioration des chaînes de valeur peut augmenter la quantité et la qualité des produits alimentaires à échanger, ce qui rendrait les chaînes de valeur régionales plus compétitives vis-à-vis des importations. Cependant, le rapport met en avant le fait que les mesures mises en place pour augmenter la compétitivité devraient également offrir des opportunité d’éducation et de formation et protéger le droit du travail.
  6. Coordonner la prévention et la réponse aux crises. Les crises nationales et régionales peuvent perturber les échanges. Un effort coordonné entre les pays de la région est nécessaire pour renforcer la résilience aux chocs, dont les évènements climatiques extrêmes, les conflits, les chocs économiques, et les crises alimentaires. Des groupes de travails régionaux peuvent jouer un rôle clef dans la formulation et la mise en place de réponses politiques communes, ainsi que dans l’amélioration des capacités de réponses et dans l’offre de ressources financières et humaines permettant de conserver les échanges commerciaux en temps de crise.

 

De manière générale, la mise en place de la ZLECA représente une grande opportunité pour l’Afrique pour créer des emplois, réduire la facture liée aux importations, améliorer la sécurité alimentaire et renforcer la résilience. Le fait que ces bénéfices se réalisent ou non dépend principalement de la volonté politique et de la coordination entre les gouvernements dans les mois prochains.