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Les petits exploitants se développent grâce aux services de diffusion d’informations agricoles. En effet, le rapport sur les Politiques Agricoles Nationales (PAN) du Malawi de 2016 à 2020 fait constat que ces services ont le potentiel d’augmenter la productivité et de contribuer à la transformation agricole du Malawi mais qu’ils sont aussi une grande entrave. Le Plan d’Investissement National Agricole (PINA) (2017/18-2022/23) met en exergue le besoin d’investissement majeur afin d’améliorer la capacité institutionnelle et de revitaliser les services de cette vulgarisation agricole.
Toutefois, des incertitudes demeurent concernant l’impact de ces services de vulgarisation agricole sur les objectifs présentés dans le PAN et le PINA. Afin d’apporter des réponses à ces dernières, l’IFPRI et ses partenaires ont lancé en 2016 un projet sur trois ans. Ce projet utilise des données réelles pour analyser la demande et l’offre de services de diffusion d’informations agricoles au Malawi. De plus, il facilite la conception d’activités visant à renforcer la capacité des fournisseurs de ces services pour satisfaire la demande d’informations émanant des exploitants agricoles.
A partir d’un échantillon, représentatif au niveau national, comprenant 2880 ménages en 2016 et en 2018, l’étude a permis de collecter deux séries de données, deux séries de discussions au sein de groupes de réflexion, une enquête auprès des fournisseurs de services de vulgarisation agricole dans 15 districts, et une série d’entretiens approfondis.
Afin de conclure cette étude, d’en valider et d’en diffuser les résultats, l’IFPRI Malawi a organisé une conférence de fin de projet le 13 novembre à Lilongwe.
Pearson Soko, Cadre Supérieur en Agribusiness dans le Département des Services liés au Développement Agricole (DSDA) du Ministère Malawien de l’Agriculture, de l’Irrigation et de la Gestion de l’Eau, dès le début de cette conférence a souligné le rôle primordial du développement agricole au Malawi et l’importance de cette étude, qui pourrait être utilisée afin de conceptualiser de futurs projets. Il a notamment demandé à tous les acteurs gravitant autour des services de vulgarisation agricole de travailler ensemble afin d’améliorer la vie des petits exploitants du Malawi.
La chef du projet, Catherine Ragasa (chargée de recherches à l’IFPRI), a présenté les résultats principaux de l’étude, soulignant six tendances positives : (1) la couverture élevée des services de vulgarisation agricole, comparable à celle de l’Ethiopie et largement supérieure à celle de l’Uganda ; (2) des améliorations dans l’accès aux services de vulgarisation agricole pour les femmes et les hommes, jeunes et adultes ; (3) de bonnes notes attribuées de manière constante par les agriculteurs sur l’utilité de ces services; (4) une plus grande diversité des messages liés à la vulgarisation agricole ; (5) une utilisation plus soutenue d’outils rentables, tels que la radio et les réflexions de groupes et (6) une diversification plus importante des cultures.
Toutefois, les tendances nationales révèlent des points à améliorer. Les services de vulgarisation agricole ont permis de sensibiliser les gens aux nouvelles technologies, mais n’ont pas conduit à une plus grande adoption de ces technologies ni à des méthodes de gestion associées. La productivité agricole, la sécurité alimentaire et la commercialisation demeurent faibles.
Pour résumé, il est clair que le fait de recevoir des conseils de qualité ainsi que des connaissances sur certaines technologies conduit à une plus forte adoption de ces technologies, à une meilleure productivité et à plus de sécurité alimentaire, a conclu Catherine Ragasa. Elle a noté, en particulier, que les informations diffusées par la radio et concernant l’agriculture et la nutrition ont un impact sur l’utilisation d’engrais organique et sur la diversité alimentaire. De plus, l’accès aux différentes techniques de vente affecte la diversification des cultures, et la combinaison de différentes sources de conseils et d’approches de vulgarisation a un effet sur l’adoption de certaines technologies sur le plan national.
L’étude a révélé que le contact avec des agriculteurs principaux (qui sont élus par village afin de promouvoir bénévolement les bonnes pratiques agricoles) ainsi que leur nombre au sein de la communauté n’avaient pas d’effet sur l’adoption de nouvelles technologies sur un plan national. Cependant, la compétence de ces agriculteurs principaux joue un rôle important. Afin d’être efficace, cette approche demande un système transparent et participatif de sélection des agriculteurs principaux, des formations régulières, et le soutien des directeurs du Développement de l’Expansion Agricole et des responsables communautaires. Les Comités Agricoles de Village (CAV) font face à une situation similaire, faisait remarqué Mme Ragasa. De manière générale, leur présence n’a pas eu d’impact sur l’adoption de technologie au niveau national, bien que l’étude démontre que les CAV actifs et responsables et les organisations communautaires sont associés à une adoption plus importante de technologies.
De manière générale, Mme Ragasa a confirmé que la route était encore longue : « Ces études révèlent un certain nombre de succès, mais ces derniers demeurent des exceptions plutôt que des règles. De nombreux défis existent pour répliquer, élargir et accélérer ces réussites. »
Elle a fait part de différentes approches potentielles pour avancer suite à cette étude. Celles-ci incluent : le recentrement sur les chaînes de valeur prioritaires, l’amélioration du contenu et de la qualité des messages de vulgarisation, la révision des technologies promues, une intensification du renforcement des capacités au niveau communautaire, en incluant les techniques d’information et de communication dans les mesures de vulgarisation, et le développement d’une culture d’apprentissage et d’évaluations rigoureuses des interventions de vulgarisation agricole.
« L’étude offre des leçons utiles non seulement pour le gouvernement mais aussi pour les ONGs travaillant sur ces problématiques. Nous aimerions continuer de financer ce type d’étude », a annoncé Nikolas Bosscher, Député Général Représentant du Gouvernement des Flandres . Ce dernier a dit qu’il était heureux que le gouvernement Malawien ait accepté les résultats de l’étude et soit convaincu que ces conclusions contribueront à l’amélioration des politiques de vulgarisation.
La durabilité de ce type de projet demeure un défi de taille, a remarqué Mr Bosscher, qui ne pourra être relevé que si le gouvernement prend la relève et s’appuie sur ces réussites initiales. Il a également demandé le lancement de la stratégie de vulgarisation agricole, en élaboration depuis 2015.
Clodina Chowa , Chef du Parti pour le Renforcement de l’Expansion Agricole et de la Nutrition ( SANE ), a souligné l’importance de la plateforme DSDA pour faciliter la coordination entre le secteur privé, les ONGs, les fournisseurs de services d’expansion gouvernementaux et les agriculteurs. En citant l’étude, elle a insisté sur le besoin de se concentrer sur les chaînes de valeur, en s’assurant que les structures de coordination DSDA fonctionnent correctement, et en augmentant la capacité des CAVs et des organisations communautaires.
La table ronde s’est concentrée sur les manières dont pouvaient être utilisé les résultats de l’étude pour améliorer les services de vulgarisation. « C’est un merveilleux travail […] particulièrement en terme de méthodologie de recherche et d’interprétation des résultats. J’aurais aimé que tous les étudiants soient présents; ils auraient appris beaucoup de choses à ce sujet, » a dit l’ancien Professeur de Développement et de Sociologie Rurale de l’Université de Luanar, Charles Masangano.
Caitlin Shaw de Farmers World a annoncé: “L’étude met en avant le type de vulgarisation qui a un impact sur la diversification. A présent, nous savons que la combinaison d’informations agricoles et commerciales est cruciale pour améliorer la diversification. Nous nous sommes concentrés sur le développement de la production et pas tellement sur l’information commerciale. »
Le DG de Farm Radio Trust , George Vilili, a dit que « les résultats de cette étude aident notre organisation à améliorer l’utilisation de la radio et de la plateforme téléphonique afin de toucher plus d’agriculteurs. » Quant à lui, cette étude permet également de mesurer l’impact de la vulgarisation et de divers outils utilisés dans la prestation de services, elle justifie l’utilisation des technologies de l’information et de la communication comme l’un de ces outils.
Victoria Lonje, Coordinatrice Nationale pour le Programme Global de Développement Agricole en Afrique (CAADP) du Projet de Formation et d’Education Agricoles, Techniques et Professionnel (ATVET) , qui a pour objectif de former les agricultrices et leurs familles à des activités agricoles rentables, a souligné l’intérêt des résultats de l’étude en montrant l’importance de bien sélectionner les participants au programme et de leur fournir les compétences nécessaires. Un modèle de services de vulgarisation pourrait également être utilisé dans certains domaines du secteur privé, tels le commerce et la fabrication. Ils pourraient bénéficier de la formation et de l’éduction offerte par un système de vulgarisation bien défini, a fait remarquer Mme Lonje.
Noel Limbani, Cadre Supérieur à la DSDA, a conclu l’évènement en exprimant la gratitude du ministère vis-à-vis de cette étude, qui aidera les fonctionnaires à planifier de futures interventions. Les agriculteurs principaux jouent un rôle crucial dans la promotion des technologies, a noté Mr Limbani, car il n’y a pas assez d’employés travaillant sur la vulgarisation pour avoir un impact significatif sur l’adoption de technologies ; à présent plus de recherche est nécessaire afin d’analyser les défis freinant l’approche par agriculteur principal. Le budget alloué aux services de vulgarisation devrait être augmenté, a-t-il précisé, car ils sont essentiels à l’adoption continue de nouvelles technologies qui conduisent au développement du secteur agricole.
Vous pouvez lire la note de synthèse du projet : « Evaluer et Renforcer le Système de Développement Agricole Pluraliste du Malawi ». Pour plus d’information, vous pouvez visiter le site web du projet .
Sandra Fröbe-Kaltenbach est Spécialiste Communication au sein du Programme de Soutien de la Stratégie au Malawi de l’IFPRI (MASSP) ; Catherine Ragasa est Chercheuse Senior au sein de la Division de Développement Stratégique et de la Gouvernance de l’IFPRI. Cet article est également consultable sur le site de l’IFPRI Malawi .