Cet article a été publié pour la première fois sur IFPRI.org .
Il a été rédigé par Francesca Edralin.
La croissance économique et agricole éthiopienne rapide de ces deux dernières décennies représente une success story bien connue. En 2000, l’Ethiopie était le deuxième pays le plus pauvre au monde , d’après l’indice mondial multidimensionnel de pauvreté de l’université d’Oxford. Puis, en grande partie grâce à des investissements continus dans le secteur agricole, la croissance a augmenté et la pauvreté diminuée. D’après les données de la Banque Mondiale, l’Ethiopie était le troisième pays avec la plus forte croissance économique au monde de 2000 à 2018 en termes de PIB par habitant.
Le système agro-alimentaire est devenu la colonne vertébrale de cette croissance économique, avec environ les trois quarts de la population active employée dans le secteur agricole ou dans un secteur lié. L’aire de la transformation agricole éthiopienne fait, toutefois, face à un certain nombre de défis. Par exemple, l’économie est tellement dépendante de la production agricole à grande échelle qu’elle risque de surexploiter ses ressources naturelles.
Dans un nouveau livre de l’IFPRI, Le système agro-alimentaire éthiopien : tendances passées, défis actuels, et scénarios futurs , les éditeurs, Paul Dorosh et Bart Minten , présentent une analyse holistique du système agricole du pays et de sa durabilité à long-terme. Pour résumé des décennies de recherche économique sur l’agriculture, ce livre étudie les tendances historiques qui ont permis à l’Ethiopie de se développer, les défis actuels liés à ce développement rapide, et les évolutions futures du système agroalimentaire. Les conclusions proviennent de différentes enquêtes, dont celles réalisées par le programme Feed the Futur de l’USAID, de l’enquête sur les revenus et les dépenses des ménages, et de l’enquête annuelle sur l’agriculture de l’Agence Centrale de la Statistique éthiopienne (CSA).
Ce livre s’intéresse aux impacts du système agricole sur les moyens de subsistance éthiopiens puisque la pauvreté et la malnutrition ont diminué. Malgré des données montrant que la croissance économique éthiopienne devrait ralentir dans la prochaine décennie, ce livre explique que des investissements continus dans les infrastructures, l’éduction et les technologies au sein du pays sont nécessaires pour que le système agro-alimentaire fonctionne correctement et soit inclusif, afin de réduire encore plus la pauvreté.
Certains chapitres analysent la croissance de divers secteurs en lien avec le système agro-alimentaire, dont le marketing des intrants, les échanges, la production et la vente au détail de produits alimentaires. Des investissements immédiats sont nécessaires afin de soutenir la croissance agricole future, notamment au vu de l’augmentation continue de la demande.
De quelle manière est-ce-que le système agro-alimentaire éthiopien peut-il soutenir la croissance tout en tenant compte des menaces environnementales telles que le changement climatique et l’épuisement des ressources ? Bien que les auteurs concluent que le changement climatique ne devrait pas avoir un impact drastique sur la production globale de produits alimentaires en Ethiopie, la disponibilité des produits devrait être plus variable, alors que l’urbanisation et la croissance démographique nécessiteraient une production de produits alimentaires et d’utilisation des terres plus importantes. L’expansion intensive de l’agriculture, par exemple, dépend de la disponibilité des territoires montagneux, où 92% de la culture de céréales est réalisée. Or, il ne reste que peu de terres montagneuses libres. Les auteurs proposent d’étendre l’agriculture dans des plaines, ce qui nécessiterait de restructurer les habitudes de production et les investissements en infrastructures dans ces régions.
L’emploi non agricole étant limité dans les zones rurales, la vaste majorité de la population active dépend de l’agriculture comme source de revenus. Ainsi, ce livre argumente qu’il est important pour l’Ethiopie de naviguer entre croissance agricole et contraintes environnementales telles que l’érosion des sols et l’épuisement des sources d’eau, notamment dans les régions montagneuses. En fonction de la disponibilité des ressources à long-terme, l’économie de l’Ethiopie pourrait aussi se développer dans des secteurs autres que l’agriculture afin de répondre au besoin d’emploi rural.
L’Ethiopie représente un cas d’étude unique, pour un pays en développement, qui a réussi à investir dans son secteur agricole et à développer son économie – mais qui doit à présent ré-évaluer ces investissements afin de maintenir une croissance de long-terme. Ces expériences peuvent être un exemple pour d’autres pays qui font face à ces mêmes défis, en Afrique et dans le monde.
Francesca Edralin est interne au sein du département de communication de l’IFPRI