Encourager une alimentation saine en Afrique de l’Est : le rôle des prix des denrées alimentaires et des préférences des consommateurs
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L’accès à une alimentation saine, y compris les fruits et légumes, et la consommation de ces régimes constituent un pilier essentiel de la sécurité alimentaire. Il a été démontré que la consommation d’aliments nutritifs diminue les risques de maladies non transmissibles, comme le diabète, et de maladies cardiaques, il réduit également les taux de morbidité et de mortalité précoces. Malgré ces avantages, cependant, la population mondiale continue de surconsommer des aliments malsains, tels que ceux riches en sucre, en graisses et en sel, et de sous-consommer des aliments plus sains. Pour les consommateurs des pays à revenu faible ou intermédiaire (PRFI), l’évolution des tendances alimentaires vers des aliments plus sains nécessite de tenir compte à la fois des facteurs économiques et socioculturels. Un article récent paru dans Global Food Security examine les régimes alimentaires moyens dans quatre pays d’Afrique de l’Est et analyse les raisons et les solutions potentielles aux écarts de consommation alimentaire saine de ces pays.
L’étude se concentre sur l’Éthiopie, le Kenya, la Tanzanie et l’Ouganda, dont les économies et les systèmes alimentaires se développent et se modernisent rapidement. Les chercheurs ont utilisé les enquêtes sur les dépenses et la consommation des ménages menées entre 2014 et 2017 ; ces enquêtes étaient représentatives à l’échelle nationale et incluaient à la fois les zones rurales et urbaines. Dans le cadre des enquêtes, il était question que les ménages se souviennent de leur consommation alimentaire au cours des sept derniers jours, y compris les quantités d’aliments consommés à la maison, les dépenses en aliments achetés à l’extérieur de la maison et le coût estimé des aliments produits par eux-mêmes et des aliments qu’ils auraient pu recevoir en cadeau.
Les résultats montrent que les régimes moyens dans les quatre pays de l’étude diffèrent nettement des régimes sains recommandés (comme spécifié dans l’étude EAT-Lancet de 2019). Bien qu’il y ait eu des cas de ménages déclarant une sous-consommation de calories, de nombreux adultes consomment en fait plus de calories que nécessaire. Une autre preuve de cette surconsommation courante de calories peut être observée dans les taux de surpoids et d’obésité des pays, qui sont particulièrement élevés chez les femmes adultes (entre 8 et 33% de 2014 à 2016).
En outre, la majorité des calories consommées en moyenne proviennent des féculents, en particulier les céréales raffinées. Bien que les régimes alimentaires varient d’une région à l’autre et entre les zones urbaines et rurales, il y a une pénurie globale de fruits, de légumes, de légumineuses, de viande et de produits carnés, de produits laitiers et de poisson. Ce manque de diversité alimentaire signifie souvent une carence en micronutriments, ce qui peut avoir des effets négatifs sur la santé, comme l’anémie.
Les auteurs de l’étude ont examiné trois causes potentielles de ces écarts de consommation. Le premier est le faible budget des ménages. Les résultats montrent que la plupart des ménages interrogés ne peuvent pas se permettre l’alimentation saine recommandée dans le rapport EAT-Lancet. Cela est particulièrement vrai pour les ménages ruraux, dont les budgets alimentaires médians ne couvrent que la moitié du coût total du régime alimentaire recommandé.
Deuxièmement, les auteurs ont examiné le coût des groupes d’aliments individuels qui composent le régime alimentaire sain recommandé. Les féculents et les aliments transformés contenant des graisses et des sucres ajoutés sont de loin les groupes d’aliments les moins chers dans les quatre pays, coûtant quelques cents américains par 100 kilocalories par jour. Les viandes, les poissons et les œufs, en revanche, coûtent entre 0,50 et 1,09 $ par 100 kcal par jour. Les légumes coûtent entre 0,25 $ et 0,55 $ par kcal et par jour, tandis que les fruits et les produits laitiers coûtent entre 0,10 $ et 0,25 $ par kcal et par jour.
Pour de nombreux ménages confrontés à la pauvreté et à l’insécurité alimentaire, diversifier leur régime alimentaire pour incorporer des groupes d’aliments plus nutritifs peut tout simplement coûter trop cher pour être réalisable.
Outre les facteurs économiques, les auteurs se sont penchés en troisième position sur les préférences alimentaires globales des consommateurs. Les résultats montrent que même lorsque les revenus augmentent, les ménages montrent toujours de fortes préférences pour les féculents et pour les aliments ultra-transformés. Les ménages plus riches montrent également une préférence plus forte pour les produits d’origine animale et les fruits, mais la hausse des revenus a moins d’effet sur les préférences pour les légumes, les légumineuses, les noix et les semences. Ce dernier résultat montre que la sous-consommation de certains aliments sains n’est pas uniquement due à des contraintes économiques.
La combinaison des facteurs économiques et comportementaux de l’écart de consommation nutritionnelle en Afrique de l’Est suggère la nécessité d’une approche multidimensionnelle, concluent les auteurs. Du côté de l’offre, les investissements dans la production agricole sensible à la nutrition, les chaînes de valeur modernisées et les infrastructures telles que l’entreposage frigorifique peuvent accroître l’accessibilité et l’abordabilité des aliments nutritifs. Du côté de la demande, la conception d’interventions efficaces est plus complexe. Bien que des programmes comme l’alimentation scolaire, les transferts alimentaires et monétaires et la taxation des aliments malsains puissent être utiles pour encourager la consommation d’aliments plus nutritifs, les préférences des consommateurs sont lentes à changer. En outre, les interventions visant à modifier les comportements doivent tenir compte des contextes locaux et régionaux. Des recherches supplémentaires sont nécessaires sur l’efficacité de ces interventions dans les PRFI en particulier.