La prospérité du secteur agricole dépend de l’interaction entre une grande variété de facteurs agro-écologiques, économiques et sociétaux. La santé du sol représente une pièce très importante de ce puzzle ; la perte des terres et l’infertilité des sols représentent une menace significative pour le développement économique global dans des pays qui dépendent largement de l’agriculture, dont de nombreux pays d’Afrique sub-saharienne.
La FAO a récemment réalisé une étude sur la perte des terres au Malawi , en partenariat avec l’Initiative Pauvreté-Environnement (IPE) du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) et du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE). Les trois types de sols que l’on retrouve généralement à travers le pays sont particulièrement sensibles à l’érosion à cause de leurs propriétés physiques et chimiques ; de plus, le pays a connu une baisse significative (neuf pour cent, de 1991 à 2010) de l’étendue de terres couvertes de forêt naturelle en faveur de l’augmentation des terres agricoles. Bien que l’augmentation des terres cultivées puisse avoir des avantages pour les rendements agricoles du pays, elle pourrait aussi avoir des impacts négatifs continus sur les sols si des techniques appropriées de gestion des terres ne sont pas utilisées sur les terres cultivées.
Le rapport de la FAO se base sur des études de sol antérieures réalisées au Malawi depuis 1970 ; la plupart de ces documents se sont concentrés sur les taux de pertes à l’échelle des parcelles, en utilisant des modèles d’estimation des pertes en terre tels que SLEMSA ( Modèle d’estimation pour l’Afrique australe ). Ces études au niveau des parcelles ont majoritairement montré des taux de pertes en terres situés entre 0 et 20 tonnes/ha/an. Seules quelques études existantes sont d’envergure nationale ; elles ont estimé que le Malawi a connu des taux de perte moyenne nationale de 33 tonnes/ha/an. L’étude de la FAO applique le modèle SLEMSA pour estimer les pertes en terres arables à une échelle nationale, afin de suivre l’historique de la perte des terres arables au cours des 10 dernières années, d’identifier les potentielles raisons des pertes et de mieux planifier les futurs programmes d’évaluation de la perte des terres.
L’étude montre qu’en 2014, le taux moyen de perte des sols était de 19 tonnes/ha/an. Les régions du nord du pays ont enregistré des taux de pertes modérés, entre 0,4 et 39 tonnes/ha/an ; les facteurs favorables dans cette région semblent être la topographie (de nombreuses pentes raides), les types de sols fragiles et peu profonds et les mauvaises pratiques de gestion des sols. De plus, l’analyse chronologique des tendances de la perte des sols entre 2000 et 2014 montrent que les taux de perte des sols dans les zones nord ont augmenté pendant cette période ; de nombreuses zones qui ont fait l’expérience de cette augmentation de la perte des sols ont également connu des changements dans l’utilisation des terres (forêt naturelle transformée en terres agricoles) pendant la même période, mettant en évidence l’impact que de tels changements dans l’utilisation des terres peuvent avoir sur la santé des sols s’ils ne sont pas accompagnés d’une gestion appropriée.
Les zones du sud du pays, d’autre part, ont montré une baisse des taux de pertes des sols entre 2000 et 2014 ; dans certaines zones du sud, les taux de pertes des sols ont baissé à moins de 10 tonnes/ha/an à la fin de cette période.
L’étude identifie deux facteurs principaux derrière les taux élevés de perte des sols au Malawi : les sols fragiles sur les pentes raides et les précipitations érosives. Les activités humaines peuvent aussi exacerber ces facteurs. Les activités agricoles entreprises sur des sols fragiles ou des pentes raides jouent un grand rôle dans l’augmentation des taux de perte des sols. L’expansion des terres agricoles du Malawi au détriment de la couverture forestière naturelle a réduit la couverture végétale et exposé plus de sols aux précipitations érosives du pays. De plus, les politiques de gestion durable des terres n’ont pas été adéquatement mises en œuvre pour protéger la végétation et assurer l’utilisation durable des ressources naturelles non-renouvelables.
L’étude de la FAO se termine avec plusieurs recommandations concernant la gestion des sols, ainsi que les études et les politiques de gestion des sols.
En termes de politiques, l’étude suggère que le personnel du Département de Préservation des Ressources du Sol (LRCD) pourrait être mieux soutenu à travers des formations à l’utilisation des logiciels et des modèles permettant de suivre la perte des sols et l’utilisation des ressources environnementales à travers le pays. L’étude suggère également que le Département établisse un cadre de renforcement des capacités détaillé qui soutiendrait ce type de formations. Deuxièmement, l’étude recommande une évaluation de l’impact de la perte des sols sur la productivité agricole, afin d’identifier plus pleinement les options politiques efficaces permettant de gérer la perte des sols et les mauvaises pratiques de gestion des sols. Troisièmement, les décideurs politiques doivent assurer que les résultats de la recherche seront utilisés dans le développement : de stratégies, programmes et services d’extension pour une utilisation durable des terres et des pratiques de gestion ; de programmes de conservation des sols dans les zones à haut risque ; et de pratiques adéquates de conservation des ressources en eau et de gestion de la qualité.
L’étude de la FAO a été axée principalement sur la perte des sols arables due aux précipitations et aux ruissellements ; des études futures pourraient être centrées sur d’autres types de perte tels que l’érosion des berges, pour déterminer leur impact sur les taux de perte des sols au Malawi. De plus, les chercheurs devraient se concentrer sur l’explication des taux déclinants de pertes des sols dans les régions du sud du pays et tirer des leçons potentielles pour l’utilisation dans d’autres domaines. Enfin, l’étude recommande la création d’un réseau de suivi pour assurer une mesure correcte et régulière des pertes en terre et en fertilité. Un tel réseau peut fournir aux décideurs politiques les preuves scientifiques dont ils ont besoin pour établir des programmes efficaces et durables.