Indice de la faim dans le monde: L’Afrique, la plus affectée
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Bien que la faim dans le monde ait baissé de manière significative depuis les années 2000, les niveaux de la faim en Afrique sub-saharienne restent élevés – ce sont en réalité les taux les plus élevés du monde. C’est la conclusion de l’indice 2016 de la faim dans le monde publié aujourd’hui par l’IFPRI, Concern Worldwide et Welthungerhilfe .
Plus spécifiquement, la faim dans le monde en développement (mesurée par la prévalence de la malnutrition, la prévalence de l’insuffisance pondérale et du retard de croissance chez les enfants, et le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans) a reculé de 29 pour cent entre 2000 et 2016. Cependant, l’Afrique sub-saharienne possède l’indice le plus élevé de faim dans le monde, à savoir 30,1, et le continent abrite cinq des sept pays du monde qui sont encore à des niveaux « alarmants » de famine. La République Centrafricaine, le Tchad et la Zambie présentent les taux les plus élevés de famine dans le rapport de cette année (46,1 ; 44,3 et 39, respectivement). Le rapport montre que près de la moitié de la population de la RCA et de la Zambie souffre de malnutrition. De plus, la RCA et le Tchad ont également connu un pourcentage relativement faible de réduction de la faim depuis 2000 en raison la guerre civile prolongée et des récents évènements climatiques extrêmes qui ont réduit la production alimentaire.
En plus du conflit et des mauvaises conditions climatiques, le manque de données représente aussi un défi pour la réduction de la faim en Afrique subsaharienne. Les résultats de l’IFM pour de nombreux pays de la région (Burundi, RDC, Erythrée, Somalie, Sud Soudan et Soudan) n’ont pas pu être calculés à cause de l’insuffisance des données ; cependant, la documentation existante, en particulier en ce qui concerne la malnutrition chez les enfants et la mortalité infantile, suggère que ces pays courent un risque particulier d’atteindre des niveaux extrêmement élevés de famine. Toutefois, en l’absence de données actualisées, il sera difficile d’identifier et de franchir les obstacles spécifiques auxquels sont confrontés ces pays en termes d’alimentation de leurs populations.
Le rapport souligne aussi que les données sont essentielles au niveau sub-national car la valeur des indicateurs de l’IFM varient énormément à l’intérieur des pays. Par exemple, les indicateurs de l’IFM varient énormément à l’intérieur de la Zambie et la Sierra Leone ; avoir une meilleure compréhension de ces variations sub-nationales peut aider les gouvernements et les chercheurs à identifier des zones en crise ou des zones où les progrès des indicateurs de la faim sont très lents, permettant la création de politiques et de programmes spécifiquement taillés pour relever les défis rencontrés par ces communautés.
Concern Worldwide et Welthungerhilfe ont également publié une série d’ études de cas par pays pour étayer l’IFM ; deux pays africains (le Malawi et le Burundi) sont couverts par cette série. L’étude de cas montre qu’au Burundi, le retard de croissance chez l’enfant reste très élevé, soit 57,5 pour cent ; de plus, jusqu’à 81 pour cent de la population burundaise est classée pauvre et 50 pour cent vivent l’extrême pauvreté. Une période récente d’instabilité socio-politique a abouti à une baisse drastique de l’aide étrangère bilatérale et un grand nombre de populations déplacées à l’intérieur du pays. Toutefois, malgré ces défis, le rapport indique que les terres fertiles du Burundi, le climat doux, les richesses minières et l’avantage comparatif dans le secteur agricole en comparaison avec ses voisins, donnent aussi au pays un potentiel énorme pour la croissance et pour atteindre l’objectif d’éliminer la faim dans le monde. Les programmes et interventions de développement du gouvernement devraient être focalisés sur la stabilisation des niveaux de consommation alimentaire des populations, renforçant les bonnes pratiques de nutrition et d’éducation et augmentant les opportunités de s’engager dans des activités génératrices de revenus, en particulier dans les zones rurales. De telles politiques et de tels programmes nécessiteront un engagement politique fort, plus de financements de la part des agences gouvernementales et des partenaires internationaux au développement, et une coordination des parties prenantes.
Au Malawi, le secteur agricole s’est rapidement agrandi au cours des dernières années et jusqu’à 80 pour cent de la population dépend de l’agriculture pour sa subsistance. L’étude de cas indique que 20,7 pour cent de la population du Malawi souffre de malnutrition et 37 pour cent des enfants souffrent d’un retard de croissance. S’attaquer aux causes de ces taux élevés de famine est devenu la priorité pour le gouvernement malawite et on note un engagement fort de la part des agences du gouvernement et des donateurs internationaux pour éliminer la malnutrition. Le gouvernement du Malawi travaille actuellement sur une Politique Nationale de Nutrition et un Plan d’Accompagnement Opérationnel pour éliminer les obstacles (tels que les coûts des transports et le manque de données et de formation) qui persistent dans la mise en œuvre des services de nutrition et de santé. Le plan national établi aidera les décideurs politiques et les partenaires au développement non seulement à réagir face à la malnutrition existante et à la traiter, mais aussi à prévenir la malnutrition dans le futur et atteindre l’objectif d’éliminer totalement la faim. L’étude de cas souligne toutefois qu’atteindre ces objectifs nécessitera des fonds nationaux supplémentaires pour les programmes de nutrition et de santé.
L’IFM de 2016 conclut avec plusieurs recommandations de politique sur les voies et moyens permettant à chaque pays, et au monde dans son ensemble, d’atteindre l’élimination totale de la faim d’ici 2030. Parmi ces recommandations : un accroissement de l’engagement politique intégrant les objectifs de nutrition et de faim dans les plans de développement nationaux et fournissant un financement à long terme et une action coordonnée à travers les secteurs (notamment, agriculture, santé et éducation) ; une perspective sur les approches novatrices visant à minimiser les pertes alimentaires et le gaspillage, à prioriser la production agricole pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle et améliorer la productivité des petits producteurs ; le besoin de traiter des inégalités structurelles pour assurer l’inclusion des populations vulnérables, telles que les femmes et les groupes minoritaires, dans la croissance et leur assurer un accès égal à la sécurité alimentaire et nutritionnelle ; et une meilleure collecte de données pour mesurer et suivre avec plus de précision les progrès réalisés vers l’atteinte des objectifs de sécurité alimentaire et nutritionnelle.