Augmenter la résilience en utilisant les réserves alimentaires regionales
En 2011, les ministres de l’agriculture des pays du G-20 se sont rencontrés à Paris pour discuter de la meilleure manière d’atténuer les effets néfastes de la volatilité des prix suite aux chocs des prix alimentaires de 2007-08 et 2010-11. Un des résultats de cette rencontre ministérielle a été la création du système d’information du marché agricole (AMIS), qui a pour but de fournir de meilleures informations dans les meilleurs délais sur l’offre et la demande, et ainsi de permettre la formulation de politiques en meilleure connaissance de cause. Cette rencontre a également abouti sur le soutien d’un programme pilote pour établir une réserve humanitaire de céréales dans les pays de la CEDEAO. La réserve devait fonctionner comme un stock d’urgence à partir duquel les pays pourraient s’approvisionner en céréales pour répondre aux besoins humanitaires à court terme pendant les périodes de sécheresse ou autres pénuries de production. La réserve a été conçue de manière à disposer d’une quantité suffisante de céréales pour aider les pays à gérer leurs besoins nationaux jusqu’à l’arrivée des importations ou de l’aide alimentaire (généralement 2 à 3 mois). L’idée derrière la création d’une réserve régionale était qu’en regroupant les risques à travers la région, cela permettrait aux pays de se constituer des réserves nationales plus réduites.
Dans le cadre de la recherche en cours sur les réserves régionales financée par EC-IFAD, les chercheurs de l’IFPRI travaillent actuellement avec les autorités de la CEDEAO et d’autres acteurs régionaux pour développer cette réserve humanitaire régionale. La recherche inclut l’analyse des principaux problèmes de conception tels que 1) la taille et le lieu de la réserve, 2) les règles d’acquisition, de distribution et de réapprovisionnement de la réserve, et 3) la composition de la réserve (quelles céréales inclure ? faut-il ou non inclure des aliments pour le bétail ?) La recherche inclut également une étude globale qui examine la gouvernance ainsi que d’autres problèmes de conception.
Entre autres problèmes de gouvernance, la question qui se pose est la suivante : quelles seront les relations entre la réserve régionale et les autorités nationales et locales de la réserve ? Les régimes de stockage public ont tendance à évincer les actionnaires privés, diminuant ainsi le rôle potentiellement stabilisateur que peuvent jouer les acteurs du marché privé. La présence d’une réserve régionale peut aussi potentiellement créer des problèmes de risque moral ; les pays peuvent penser qu’ils n’ont pas besoin de conserver autant de stock qu’ils ne le feraient en l’absence de la réserve régionale. Ceci pourrait diminuer l’efficacité de la réserve régionale, étant donné qu’elle est censée augmenter et non remplacer les réserves nationales.
Le rapport à venir de l’IFPRI compare la proposition de réserve de la CEDEAO à d’autres architecture de réserve, y compris la ASEAN Plus Three Emergency Rice Reserve , une réserve nationale de riz gérée par les pays de l’ANASE. Des efforts de modélisation sont également en cours pour examiner les problèmes de lieu et de taille, avec un rapport prévu pour publication cette année. De plus, les stockages publics ont été au centre des négociations récentes à l’Organisation Mondiale du Travail ; certains membres sont préoccupés par le fait que les règles de soutien national actuelles sont trop restrictives en ce qui concerne les programmes publics de stockage. Des documents récents de Joe Glauber et Eugenio Dias-Bonilla discutent des modifications potentielles aux règles actuelles qui rendraient ce type de réserves humanitaires proposées par la CEDEAO compatibles avec les règles de l’OIT et soulageraient les préoccupations des autres membres selon lesquelles les changements pourraient entraver les règles de soutien nationales.
De plus, l’IFPRI, en collaboration avec l’Agence Régionale de la CEDEAO pour l’Agriculture et l’Alimentation (ARRA), a organisé deux ateliers
en 2016 à Ouagadougou, Burkina Faso, pour rencontrer les autorités des réserves nationales du Niger, du Nigeria, du Mali et du Burkina Faso, ainsi que des groupes d’intervenants provenant de la région, et discuter des problèmes de mise en œuvre et de conception. De futurs ateliers sont prévus courant 2017 en Afrique de l’Ouest.