L’augmentation de la participation dans les chaînes de valeur mondiales à fort potentiel peut stimuler la croissance et aider les pays en développement à atteindre leurs objectifs économiques et de développement. Cependant, toutes les chaînes de valeur ne sont pas créées de manière égale, et la capacité des pays à participer aux chaînes de valeur mondiale (CVM) est déterminée par les caractéristiques et les exigences spécifiques de chaque chaîne. Un nouveau rapport du Centre international pour le commerce et le développement durable (ICTSD) examine le potentiel de l’Afrique de l’Ouest pour une participation dans des chaînes de valeur plus lucratives et fait plusieurs recommandations concernant les chaînes de valeur et les politiques de chaînes de valeur qui devraient être au centre de l’attention des décideurs politiques.
La mise à niveau pour une participation dans des chaînes de valeur à plus fort potentiel exige une compréhension des capacités existantes de la région. Le rapport souligne qu’une mise à niveau réussie exige aussi l’identification des chaînes de valeur qui offrent (i) des marchés dynamiques, (ii) un potentiel pour soutenir les objectifs de développement durable (ODD) et les pays les plus vulnérables de la région, et (iii) des opportunités concrètes d’amélioration à court terme.
Sur la base de ces critères de référence, le rapport a identifié six chaînes de valeurs mondiales qui détiennent le plus fort potentiel pour une participation réussie des pays africains : la transformation des fèves de cacao en chocolat ; les noix de cajou ; la pêche ; les autres aliments transformés (comme la tomate concentrée, les pâtes et la bière par exemple) ; les services informatiques ; et les liens en amont avec les industries d’extraction (minéraux, pétrole et gaz naturel). A partir de ces six chaînes de valeur, le rapport rétrécit encore la liste aux chaînes de valeur qui devraient être prioritaires, à savoir : les produits halieutiques, les aliments transformés et les services informatiques.
Ces chaînes de valeur ont été sélectionnées parce que les preuves montrent qu’il existe déjà des marchés dynamiques pour ces produits aux niveaux régional et mondial. De plus, ces chaînes de valeur ont de solides liens en amont avec les secteurs de l’agriculture et de la pêche et des potentiels liens en aval avec les chaînes de magasin modernes. Ainsi, ces chaînes de valeur peuvent fournir des opportunités d’emploi significatives pour de multiples niveaux de compétence à l’intérieur de la région.
Chacune de ces chaînes de valeur possède ses propres caractéristiques, mais il existe aussi plusieurs thèmes transversaux à travers toutes les chaînes de valeur. Le rapport utilise ces thèmes pour faire des recommandations générales permettant d’augmenter la participation dans les CVM à travers l’Afrique.
Tout d’abord, la qualité doit être une composante importante des politiques de mise à niveau des chaînes de valeur dans la région. Assurer la qualité des biens et des services de la région augmentera les rendements provenant de la participation aux CVM ; ceci implique un engagement dans des processus de certification qui garantissent aux marchés et aux consommateurs finaux un certain niveau de qualité. Le rapport souligne que les noix de cajou et les fèves de cacao en particulier ont des références de qualité intra régionales différentes. Les politiques pour combler ces lacunes en termes de qualité et soutenir la production et la certification de marchandises de grande qualité devraient être une priorité.
Deuxièmement, et dans la même idée, une mise à niveau réussie exigera des politiques sectorielles bien conçues et efficacement mises en œuvre. Ces politiques incluent le développement agricole pour assurer un approvisionnement fiable en produits de base peu coûteux et de bonne qualité ; le développement industriel pour stimuler les investissements et construire des capacités technologiques ; l’amélioration des infrastructures pour assurer que les entreprises et les producteurs disposent des installations et des services adéquats ; l’éducation pour aider les acteurs des chaînes de valeur à développer les compétences nécessaires pour des activités plus sophistiquées ; et des lois sur le travail pour assurer des normes de santé et de sécurité et des conditions de travail décentes. Toutes ces politiques nécessiteront une forte volonté politique et plus d’investissements de la part du gouvernement.
Troisièmement, les décideurs politiques doivent comprendre comment chaque chaîne de valeur fonctionne et comment elle est dirigée, afin de créer des politiques efficaces. Par exemple, le rapport montre que les broyeurs de cacao de la région délocalisent les usines intermédiaires dans des pays producteurs de cacao ; les décideurs politiques dans les pays en développement peuvent exploiter cette tendance existante pour soutenir leurs stratégies globales de mise à niveau des chaînes de valeur. A l’autre extrémité de la chaîne, le rapport montre que les supermarchés de vente au détail ne font pas la promotion du traitement des noix de cajou ou des produits de la pêche dans les pays producteurs ; dans ce cas de figure, les gouvernements pourraient se concentrer sur des politiques pour inciter les grandes entreprises de supermarché à soutenir leurs stratégies de mise à niveau ou à sanctionner les entreprises qui ne le font pas.
Quatrièmement, il convient d’accorder une attention particulière aux chaînes de valeur régionales en plus des chaînes de valeur mondiales, étant donné que les chaînes régionales offrent également suffisamment d’opportunités de mise à niveau. Le commerce intra régional en Afrique de l’Ouest dispose de valeurs d’exportation plus faibles que le commerce mondial, mais les produits exportés vers les marchés régionaux sont de plus grande valeur. De plus en plus d’aliments transformés, de produits usinés en plastique ou en métal, et des segments de plus grande valeur ajoutée des produits de base tels que les tissus, le chocolat et les cacahuètes grillées, et de nombreux services informatiques sont exportés vers les marchés régionaux. Cela pourrait s’expliquer par le fait que les marchés régionaux ont des barrières à l’entrée plus faibles. Inclure ces marchés intra régionaux dans les politiques de chaînes de valeur peut aider les pays en développement à étendre leurs chaînes de valeur de manière plus durable.
Cinquièmement, les politiques de chaîne de valeur doivent inclure un focus sur le développement, particulièrement l’atteinte des objectifs de développement durable (ODD). Les chaînes de valeur mondiales ont le potentiel de réduire la pauvreté et d’augmenter l’égalité de genre et la durabilité environnementale ; cependant, pour ce faire, les gouvernements doivent établir des politiques appropriées pour les règlementations professionnelles et environnementales, l’éducation, et un accès amélioré aux services, au financement et aux marchés pour les femmes. Les obstacles (sociaux et économiques) à la participation dans les chaînes de valeur à fort potentiel peuvent être mieux surmontés à travers une coopération entre les intervenants clés, des entreprises et des agences gouvernementales aux ONG et aux syndicats. Les gouvernements peuvent jouer un rôle clé dans le rassemblement de ces intervenants en établissant des politiques et des règlementations justes et transparentes.
La mise en pratique de ces recommandations pourrait aider les pays en développement à travailler avec les caractéristiques spécifiques des chaînes de valeur prioritaires et ainsi intensifier la production interne afin de participer aux activités économiques de plus grande valeur.