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Atténuer le changement climatique en Éthiopie : politiques et priorités

L'Éthiopie est confrontée à la pire sécheresse des 40 dernières années, avec six saisons de pluies consécutives infructueuses ou inférieures à la moyenne dans les zones pastorales du pays. Dans le même temps, les inondations dans d’autres régions ont perturbé les moyens de subsistance et causé d’importants dégâts aux terres et aux infrastructures. Selon un nouveau rapport du Groupe de la Banque mondiale , de tels chocs climatiques ont largement contribué aux récents revers économiques de l'Éthiopie. Une action gouvernementale forte est nécessaire pour se préparer et s'adapter à un avenir climatique incertain.

De 2004 à 2019, l’Éthiopie a connu une croissance économique et une réduction de la pauvreté impressionnantes. Ces progrès ont toutefois ralenti ces dernières années. Des chocs cumulés, tels que la pandémie de COVID-19, les conflits mondiaux et régionaux en cours, la hausse mondiale des prix alimentaires et énergétiques, le changement climatique et une situation macroéconomique nationale de plus en plus fragile, ont réduit la croissance du PIB du pays à environ 6 % par an.

Le rapport révèle que les coûts imposés par le changement climatique ne feront que continuer à croître, et à croître rapidement, jusqu'en 2030 et au-delà. Dans le cadre des politiques économiques actuelles du pays, qui s'appuient largement sur des investissements dirigés par l'État et peu ou pas de réformes structurelles, les pertes annuelles moyennes du PIB et de la consommation des ménages dues aux impacts du changement climatique pourraient atteindre 1,5 % par an d'ici 2030 et même plus. 5 pour cent par an au-delà de 2030. Les pertes économiques cumulées, sur la base du PIB de 2022, se situeraient entre 10 et 14 pour cent d’ici 2030 et entre 20 et 30 pour cent dans les années 2040.

La pauvreté continuera également à augmenter dans les décennies à venir dans le cadre des politiques actuelles, augmentant jusqu’à 1,7 point de pourcentage d’ici 2050. Cela pourrait signifier que 3,7 millions de personnes supplémentaires vivraient dans la pauvreté en raison des impacts du changement climatique.

Ces impacts varieront selon les régions et les secteurs, souligne le rapport. La dégradation des terres et les impacts sur l'agriculture et l'élevage seront plus graves dans les basses terres du pays. Sur le plan sectoriel, le secteur de l’élevage subira des impacts négatifs bien plus importants que le secteur des cultures.

Des réformes structurelles des politiques agricoles pourraient atténuer ces impacts. Dans un scénario de réforme structurelle, les pertes annuelles moyennes du PIB et de la consommation des ménages seraient proches de 1 % d'ici 2030. De telles réformes pourraient accroître la production agricole même avec le changement climatique, réduisant ainsi la dépendance du pays à l'égard des importations alimentaires d'ici 2030 et même créant des excédents exportables de produits alimentaires de certaines cultures dans le futur. La réforme structurelle réduirait également le coût d’entretien et de réparation des infrastructures clés telles que les routes et les ponts de plus d’un sixième des 755 millions de dollars estimés entre 2041 et 2050 dans le scénario politique actuel.

Toutefois, la réforme structurelle ne suffira pas à elle seule, poursuit le rapport. Des investissements dans des stratégies d'adaptation au changement climatique, décentralisées et adaptées aux contextes locaux, seront nécessaires pour accroître efficacement la résilience de l'Éthiopie au changement climatique. Investir dans la gestion durable de l'eau, par exemple, pourrait améliorer les systèmes de stockage d'eau existants du pays et aider les populations à mieux gérer les changements climatiques dans les régimes de précipitations. De même, des investissements dans la recherche et le développement agricoles visant à se concentrer sur des variétés de cultures et d’élevage plus résilientes au changement climatique pourraient contribuer à protéger ces secteurs contre des impacts négatifs importants.

Le rapport souligne la nécessité pour les acteurs du secteur privé – entreprises privées, agriculteurs et consommateurs – d’être plus autonomes et éduqués pour adopter des stratégies efficaces d’adaptation et d’atténuation du changement climatique. La réforme structurelle sera essentielle pour dynamiser le secteur privé du pays.

En outre, les politiques et les programmes doivent être décentralisés pour donner aux gouvernements locaux la flexibilité d'adapter et de mettre en œuvre des réponses qui répondent aux besoins climatiques uniques de leur région.

Enfin, l’Éthiopie devra continuer à renforcer ses programmes de protection sociale pour aider les ménages pauvres ruraux et urbains à devenir plus résilients au changement climatique.

Sara Gustafson est consultante indépendante en communications.